N° 123 de la revue Intervalles

Le vallon horloger et ses anarchistes

Le Vallon horloger et ses anarchistes

Le Vallon horloger et ses anarchistes de Florian Eitel emmène d’abord les lectrices et lecteurs au cœur de Saint-Imier et de Sonvilier, en cinq chapitres: l’espace, le marché, les frontières, les réseaux, le temps, toutes dimensions en pleine transformation, dans le dernier tiers du XIXe siècle, qui préfigurent l’avènement de la mondialisation. Des immeubles se construisent, le train arrive en 1874, reliant petit à petit La Chaux-de-Fonds à Bienne et aux grandes lignes de chemin de fer. Le marché des montres est confronté à la concurrence américaine, des usines s’installent et les ouvriers s’associent, les machines modifient les conditions du travail à domicile traditionnel ; la mobilité de la main-d’œuvre en témoigne.

La deuxième partie de l’ouvrage présente le Congrès international de Saint-Imier, le 15 septembre 1872, où quinze délégués, dissidents de l’Association internationale des travailleurs dirigée par Karl Marx, et nombre d’assistants et assistantes vont fonder « l’Internationale antiautoritaire ». Ils viennent du Vallon ou d’ailleurs, proscrits de la Commune de Paris, étudiantes russes de Zurich, quelques italiens et espagnols. Les quatre résolutions adoptées vont devenir, au cours des années suivantes, une sorte de charte du mouvement anarchiste. Les considérants posent le diagnostic des maladies dont souffre l’Internationale, pour ensuite proposer des remèdes: la conclusion d’un pacte d’amitié et de solidarité, en vue de l’organisation de la résistance et de la destruction de tout pouvoir politique.

Le chapitre suivant examine la diffusion et la réception des résolutions: réunions, congrès régionaux, journaux (et leurs imprimeries), correspondances, conférences, jusqu’aux actions directes comme les grèves ou les manifestations font connaître le sens du pacte de Saint-Imier de par le monde. Le développement des sociabilités et des réseaux est évidemment concomitant.

La troisième partie nous ramène au Vallon, ce «laboratoire du fédéralisme anarchiste». Pendant une dizaine d’années s’y développent des sociétés de résistance, des mutuelles, des pratiques culturelles originales. Sur des bases très concrètes s’y élaborent les formes de la société future, qui passent par le refus de la politique traditionnelle, donc la rupture avec le Parti libéral-radical. Avec les limites que l’on peut imaginer: l’organisation se limite pratiquement aux ouvriers horlogers et non aux autres métiers, les femmes y ont peu de place et de visibilité.

La construction d’une communauté passe par la presse et la correspondance, ainsi que par les éléments visuels, décors et surtout photographie. Les petites photos cartonnées au format de cartes de visite s’échangent et circulent, on en trouve dans les fonds d’archives ou les dossiers de police. Il faut examiner l’avers et le revers pour découvrir les traces d’un photographe méconnu de Saint-Imier, Sylvain Clément, membre actif de la Fédération jurassienne.

Et puis, on chante! Bien sûr, en Suisse on chante partout, de l’école à l’armée, les airs sont connus, de nouvelles paroles s’y adaptent, des couplets s’improvisent. Ils disent la condition ouvrière, la répression, la lutte, exaltent l’internationalisme, le drapeau rouge, la solidarité. Solidarité mise en pratique lors de procès, de grèves, ici et ailleurs : on envoie des souscriptions aux compagnons, on met en garde ceux qui pourraient être recrutés comme briseurs de grève.

Tout cela contribue à construire une représentation de la révolution sociale et du monde nouveau. En bons positivistes, les anarchistes pensent que la connaissance, la maîtrise de la statistique notamment, rendront inutiles les gouvernements, caduc l’État. La commune sera une cellule de base de la grande fédération universelle ; la Commune de Paris a montré l’exemple.

Les ouvrages de Charles Thomann (Le Mouvement anarchiste dans les Montagnes neuchâteloises et le Jura bernois, 1947) et de Marianne Enckell (La Fédération jurassienne, 1971) faisaient l’histoire des idées ; le livre de Florian Eitel est une histoire sociale, économique et culturelle du val de Saint-Imier et de ses anarchistes.

No 122 - Bohème Biennoise

Auteurs/coordinateurs:

Auteur: Florian Eitel, +41 77 488 08 03

Responsable de la réalisation: Julien Steiner, revue Intervalles, +41 79 293 26 06

Responsable Intervalles
Jean-Marie Hotz

 

Descriptif technique
Format 170 x 250 mm
Contenu 232 pages

77 illustrations

Prix de vente
CHF 40.- + frais d’envois

ISSN 1015-7611

Sortie: 15 septembre 2022

Texte du communiqué (.pdf, .doc) et photos disponibles sur: www.intervalles.ch/presse1

Visuels

Nous vous prions d’indiquer la source de ces images. L’usage de ces images est limité à l’illustration d’un article concernant ce numéro de la Revue Intervalles. Elles ne peuvent en aucun cas être utilisées à d’autres fins.